HAUSA

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Au nord du Nigeria et au sud du Niger vit une population estimée en 1992 à près de vingt-trois millions de personnes dont la langue maternelle est le hausa, classée par J.-M. Greenberg parmi les langues afro-asiatiques, avec le sémitique, l’ancien égyptien, le berbère et les langues couchitiques de l’Éthiopie. Elle s’écrivit du XIVe siècle au XIXe siècle avec des caractères arabes; actuellement, l’on se sert de l’alphabet latin.

De race noire, les Hausa sont fortement métissés de Peul. Ils entretiennent depuis longtemps des rapports commerciaux avec les pays situés au nord et à l’est du Sahara, aussi les influences venues de ces régions sont-elles sensibles dans le domaine de la religion, de l’art aussi, aux yeux de certains. Les villes de ce peuple d’actifs commerçants et artisans eurent un rayonnement considérable au Soudan occidental (royaumes ou sultanats de Kano, Zaria, Sokoto).

Le climat de la région habitée par les Hausa est chaud, sec de novembre à mai, humide pendant la saison des pluies, saison d’activité dans les fermes. La savane, de moins en moins boisée à mesure qu’on s’approche du Sahara, au nord, est irriguée par des cours d’eau à galerie forestière.

Agriculteurs et commerçants

L’économie hausa traditionnelle est complexe. L’agriculture produit les vivres, dont les surplus sont exportés ou échangés contre la viande, le lait caillé, l’engrais, le beurre procurés par les pasteurs peuls. L’élevage se limite aux moutons et aux chèvres, aux ânes pour le portage et aux chevaux pour le prestige. La pêche est pratiquée, la chasse très peu. Le ramassage et la cueillette procurent le bois à brûler, des fruits sauvages, des matériaux de construction, de l’huile. Les artisans spécialisés sont nombreux: bouchers, tanneurs, selliers, tisserands, teinturiers, constructeurs de huttes, tailleurs de bois, forgerons, orfèvres, potiers, tambourineurs, malam ou marabouts. Le commerce hausa est renommé qu’il s’agisse de commerçants attachés aux marchés, ou spécialisés dans les longs trajets par caravanes qui atteignent la Méditerranée grâce au relais des Touareg.

L’économie hausa, stimulée par le commerce, offrait donc des choix nombreux aux individus. Son dynamisme peut expliquer l’assimilation rapide des étrangers si souvent observée chez eux, et la dispersion des marchands et des artisans hausa bien loin de leur terre natale.

Parenté et mariage

Ayant perdu leur structure clanique, les Hausa attachent plus d’importance aux liens de parenté bilatérale qu’à la descendance d’un même ancêtre au-delà de trois générations, excepté dans le cas des dynasties royales.

Les femmes vivent chez leur mari, et les frères, même mariés, restent en général chez leur père: l’unité de résidence comprend donc des hommes apparentés, leurs femmes et leurs enfants: la subsistance est assurée par une exploitation agricole commune, à laquelle s’ajoutent les profits individuels de l’artisanat et du commerce. Jusqu’à la fin du XIXe siècle ces familles étendues possédaient des esclaves qui habitaient dans l’enclos, et travaillaient les champs, permettant ainsi à leurs maîtres de se livrer à des occupations lucratives. L’adoption est encouragée par la coutume, les époux féconds étant tenus de donner des enfants à leurs parents stériles. La loi musulmane autorise tout homme à avoir un maximum de quatre épouses, qui doivent avoir chacune leur case. Pour des raisons religieuses, les femmes sont cloîtrées dans l’enclos, ce qui les dispense des travaux agricoles et les incite à pratiquer l’artisanat domestique: préparer la nourriture, filer le coton, fabriquer des médicaments qui sont vendus au marché par les jeunes filles; des motivations économiques se greffent donc sur les principes religieux.

Les divorces sont fréquents: une femme qui se marie vingt fois est taxée de mauvais caractère, mais trois divorces sont normaux. Souvent une mère impose le divorce à sa fille en vue d’une alliance ultérieure plus brillante, et, dans ce cas, la fille et son époux cèdent habituellement, même s’ils s’entendent bien. Toute fille doit être mariée vers l’âge de quatorze ans, même parfois contre son gré; si elle préfère un autre homme, elle peut lui promettre de venir à lui plus tard et s’arranger pour divorcer. Ainsi, malgré la claustration, dont la sévérité varie d’ailleurs selon chaque mari, les femmes ont la possibilité de disposer d’elles-mêmes dans une certaine mesure.

La prostitution, qui peut ne durer que le temps séparant deux mariages, est un moyen pour la femme d’atteindre à l’indépendance financière. Elle s’accompagne parfois du prestige de la culture et des arts. Les prostituées sont, très souvent, les prêtresses d’un culte lucratif très répandu, le bori .

Un système féodal

Les Hausa sont organisés en États dirigés par une aristocratie peule qui a conquis le pays au début du XIXe siècle. Les vieilles capitales fortifiées (Daoura, Kano, Rano, Zaria, Gobir, Katsina, Biram) ont été fondées vers le XIe siècle.

Le système politique repose sur des liens d’allégeance personnelle. Chaque État est divisé en unités territoriales centrées sur un bourg entouré de murs, où réside le chef, où se tiennent les marchés et les fêtes musulmanes, où se trouve la mosquée. Ce chef local administre la campagne environnante par l’intermédiaire des chefs d’enclos, ses vassaux. Il est vassal du roi, chef de l’État, qui lui-même était, au XIXe siècle, vassal du roi de Sokoto, émirat du nord-ouest du Nigeria, descendant en ligne masculine directe d’un conquérant peul.

Les fonctions ne sont pas strictement héréditaires, les nominations dépendant en partie du bon vouloir du supérieur. Les liens personnels avec le chef sont donc de première importance: ils sont fondés sur la parenté réelle, ou sur la clientèle qui est une parenté fictive et révocable. Le lien de clientèle joue aussi dans la vie privée, par exemple entre un commerçant et son émissaire à qui sont confiées des marchandises précieuses, parce qu’un client est loyal, par définition.

Les chefs locaux ont pour charge principale la levée de l’impôt, qu’ils remettent à leur supérieur en en gardant une partie, les salaires étant inconnus. Il leur appartient aussi de maintenir l’ordre, d’entretenir les murs de la ville, la mosquée, le marché, les chemins. Ils ont des pouvoirs judiciaires limités au droit civil.

Religion et pratiques religieuses

La religion officielle des Hausa est l’islam, qui donne forme à la vie familiale (mariages, divorces, périodes de veuvage, etc.) et intellectuelle (enseignement du Qor n par les marabouts). En marge subsistent des restes de l’ancien culte clanique. Le bori , culte à possession, a beaucoup de succès. Son origine est discutée; selon A. Tremearne, il remonterait au culte antique de Ba’al à Balylone et d’Astarté chez les Phéniciens, où la prostitution était sacrée. Les dyal bori , ou «juments des dieux» hausa, sont en pratique toujours des femmes, dont un bon nombre sont aussi prostituées. J. Nicolas ne pense pas que cette convergence vienne de religions méditerranéennes antiques; elle serait plutôt le fait de situations actuelles. En effet les prêtresses font passer au second plan le rôle social accepté d’épouse et de mère, y étant d’ailleurs souvent contraintes par la maladie ou la stérilité. Le bori et la prostitution leur procurent un rôle nouveau, marginal, mais accepté en même temps que l’indépendance financière qui permet le défi.

Le bori est fondé sur le panthéon de l’ancienne religion préislamique: chaque initiée prête son corps à quelques-uns des dieux hausa, choisis en fonction de la maladie ou de l’infortune subies et qui sont censées être envoyées par eux. Ainsi une femme stérile se vouera à Kure , le plus puissant de tous, qui l’a rendue telle à cause d’une offense; elle sera pardonnée en devenant sienne, se livrant à lui sans retour. Plus tard, elle pourra se donner aussi à d’autres divinités choisies d’après ses préférences. Au début de la cérémonie de possession, le dieu est appelé par un battement de tambour qui lui est propre.

Le bori semble être une adaptation de l’ancienne religion à la situation créée par l’islam. Dans le culte antérieur, les possessions n’étaient pas nécessaires parce que les dieux étaient présents dans la vie quotidienne. À l’opposé, Allah est loin des hommes, ce qui a fait naître le désir de manifestations sensibles du surnaturel. Les dyal bori jouent donc un rôle social utile. De leur point de vue personnel, elles compensent leurs malheurs par un certain prestige, et par un «défoulement» psychologique qui se communique à leurs spectateurs, à la façon d’un psychodrame. De plus, comme on ne refuse jamais l’appel des dieux, et que l’engagement est définitif, le besoin d’un lien permanent, que le mariage polygyne et provisoire ne peut combler, est satisfait par le bori .

hausa, Hausa
adj. et n. m. V. haoussa, Haoussa.
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Haoussa ou Hausa
adj. et n. m.
d1./d adj. (inv. en genre) Des Haoussa.
d2./d n. m. (Afr. subsah.) Petit marchand musulman.
d3./d n. m. LING Langue afro-asiatique du groupe tchadique, importante langue véhiculaire en Afrique de l'Ouest.
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Haoussa ou Hausa
populations fortement islamisées qui vivent dans le N. du Nigeria (env. 20 millions de personnes), le S. du Niger (4,5 millions) et le N. du Cameroun (160 000). Le haoussa est utilisé comme langue véhiculaire par une population beaucoup plus importante, qui notam., déborde sur le Bénin, le Togo et le Burkina Faso.
Les Haoussa ont formé dès le XIIe s. des cités-états puissantes qui atteignirent leur apogée aux XIVe et XVe s. Au début du XIXe s., des Peul se sont emparés du pouvoir dans les états haoussa, dont ils ont adopté la langue, les institutions et les coutumes.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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